ERC Starting 2023 : Trois bourses pour le CNRS à Paris-Saclay

Distinction

Le Conseil européen de la recherche (ERC) vient d'annoncer les lauréats des bourses « Starting » qui financent de manière importante les projets de jeunes chercheurs et chercheuses. Le CNRS est l’institution hôte pour 20 bourses, dont trois ont été attribuées à des chercheurs et chercheuses CNRS exerçant dans des laboratoires du cluster scientifique et technologique de Paris-Saclay.

En 2023, le Conseil européen de la recherche (ERC) a sélectionné 400 scientifiques en Europe qui ont obtenu une bourse « Starting », pour un montant total de 628 millions d'euros tirés du programme cadre Horizon Europe. Le Conseil avait reçu 2696 candidatures, soit un taux de succès de 14,8 %.

Ce financement entend soutenir des projets de recherche exploratoire sur une durée maximale de 5 ans et avec un budget de 1.5 million d'euros. Il s’adresse à des scientifiques ayant obtenu leur doctorat il y a 2 à 7 ans. Les bourses « Starting » sont le premier type de financement européen accessible aux jeunes chercheurs et chercheuses, avant les bourses « Consolidator » (jusqu’à 2 millions d’euros et 7 à 12 ans après le doctorat) et « Advanced » (jusqu’à 2,5 millions d’euros pour les chercheurs confirmés).

Cette année, 43 % des bourses ont été accordées à des chercheuses, la proportion la plus élevée depuis le début du programme Starting, un chiffre dont se réjouit Maria Leptin, présidente du Conseil européen de la recherche, qui « espère que ce taux continuera de croître ».

L’ensemble des lauréats sont issus de 24 pays européens, notamment l'Allemagne (87 projets), la France (50), les Pays-Bas (44) et le Royaume-Uni (32).

Le CNRS quant à lui affirme sa force en termes de capacité de réponse aux candidatures ERC avec un taux de succès de 19,6 %. Avec ses 20 scientifiques lauréats, il demeure le premier bénéficiaire français avec 40 % des lauréats nationaux. Parmi ces 20 bourses, trois ont été attribuées à des scientifiques CNRS exerçant dans des laboratoires du cluster scientifique et technologique de Paris-Saclay :

Projet SAMIR, porté par Mathieu Casado, chargé de recherche au Laboratoire des Sciences du Climat et de l'Environnement (CEA/CNRS/UVSQ)

L’impact du changement climatique est plus important dans les régions polaires sous l’effet de boucles de rétroaction qui conduisent à une amplification polaire. En Antarctique, les données météorologiques ne remontent pas assez loin dans le passé pour évaluer la variabilité climatique aux échelles interannuelles et décennales et pour séparer l’impact du forçage anthropique de la variabilité naturelle. Le Projet SAMIR porté par Mathieu Casado va utiliser la composition isotopique d’un grand nombre de carottes de glace forées en Antarctique afin d’obtenir des enregistrements climatiques plus long. Les isotopes de l’eau sont en effet un proxy de la température, mais leur interprétation nécessite une calibration empirique de la relation isotope – température. En combinant de nouvelles approches analytiques et statistiques, sur un grand nombre de carottes de glace et en utilisant plusieurs compositions isotopiques, nous développerons des fonctions de transfert entre isotopes et température afin de démoduler les différentes contributions au signal isotopique, et reconstruire l’évolution de la température en Antarctique pendant les mille dernières années.

Portrait de Mathieu Casado
© Mathieu Casado

 

Projet Q-Light-Topo, Porté par Olesia Dmytruk, chargée de recherche au Centre de physique théorique (CNRS/École polytechnique)

Le contrôle des propriétés des matériaux par la lumière est une nouvelle direction de recherche de la physique de la matière condensée. Les matériaux topologiques sont très importants dans cette direction en raison de leur robustesse et de leur application possible dans les technologies quantiques. Le projet théorique « Q-Light-Topo » se concentrera sur l'utilisation de la lumière quantique pour sonder, contrôler et créer des phases topologiques de la matière dans des matériaux à l'état solide couplés avec des photons de cavité. Ce projet explorera comment contrôler les transitions de phase topologiques dans divers matériaux fortement couplés à la lumière, et étudiera la caractérisation topologique des excitations polaritoniques hybrides lumière-matière apparaissant dans de tels systèmes. L'objectif principal du projet « Q-Light-Topo » est de proposer un protocole d'ingénierie d'états topologiques dans des matériaux électroniques initialement triviaux avec de la lumière quantique. Concevoir de nouveaux systèmes topologiques contribuera à faire avancer le domaine des technologies quantiques.

Portrait d'Olesia Dmytruk
© copyright Dmytruk/Olesia/2023

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Projet DYNACO, Porté par Chloé Girard, chargée de recherche à l’Institut de Biologie Intégrative de la Cellule (CEA/CNRS/Université Paris-Saclay)

Les crossovers méiotiques nous rendent uniques. Leur répartition le long des chromosomes dicte quels traits seront réassortis pour créer de nouvelles combinaisons d'allèles uniques sur lesquelles la sélection peut agir. Lors de la méiose, un grand nombre d’intermédiaires de recombinaison sont initiées sur l'ensemble du génome, mais seules quelques-uns d'entre eux aboutissent à des crossovers. Le nombre final et la position des crossovers sont étroitement régulés : le long de chaque chromosome, les crossovers ont tendance à être régulièrement espacés. Ce phénomène, appelé interférence des crossovers, a été découvert en 1914 par Sturtevant et Morgan alors qu'ils dessinaient la première carte de recombinaison chez la Drosophile. L'émergence d'une régulation spatiale nécessite une communication. Mais comment la machinerie de formation des crossing-over communique-t-elle avec les crossovers voisins situés à un demi-chromosome de distance ?

Notre compréhension de la manière dont cette communication s'établit a été entravée par la faible résolution temporelle offerte par la cytologie classique, qui ne nous donne accès qu'à des aperçus du processus. Dans le cadre du projet DYNACO, Chloé Girard développera des solutions innovantes pour explorer la dynamique de la désignation et de l'interférence des crossovers. En utilisant la microscopie à super-résolution sur tissu vivant, combinée à des outils génétiques et d’optogénétiques révolutionnaires dans un système très accessible, le champignon filamenteux Sordaria macrospora, Chloé Girard abordera les questions suivantes : (i) Quelle est la dynamique des facteurs essentiels à la formation des crossovers lors de l’établissement de l’interférence ? (ii) Quel(s) mécanisme(s) sous-tend(ent) la communication entre ces facteurs ? (iii) Quelles sont les répercussions en cas de perturbation localisée de cette communication ?

Le projet DYNACO permettra des avancées fondamentales dans notre compréhension de la formation, de la désignation et de l'interférence des crossovers. Nous confronterons et réconcilierons de nombreux aspects des modèles actuels et développerons notre propre modèle unifié. Ces travaux pourraient également fournir des outils pour la manipulation de la recombinaison, afin d'accélérer l'introgression de caractères sélectifs dans les génomes des variétés d’intérêt.

Portrait de Chloé Girard
© Chloé Girard

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